allier à la profondeur la
négligence au désespoir la vitalité à la nuit sans fin la Saint-Jean recoudre l’adulte à l’enfant l’humain à l’animal à la clarté le chaos les ténèbres et l’abîme au futur le passé accorder l’être à la chanterelle du néant fiancer au masculin le fé minin l’hésitant même et multiple désobéir à l’unique
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et j’aimerais avec les yeux dont les bêtes me voient me regarder aller jusqu’à me penser même et de nudité de silence au cœur façonné me redire |
Archives des catégories : Poésie
26 mars
ce qui sans bruit fait défaut
se retire et soudain manque c’est le silence le silence du dedans celui qu’à mes j’entrebâillais lectures les textes dans les lieux bruyants pas n’entrent le silence le giron des mots premiers du poème l’ai perdu
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ne voir en moi que le petit employé de mon écriture qui chaque matin se rend au magasin pour effectuer ses livraisons c’est oublier que me tutoie presque le vide et que m’embrasse sans façon l’énormément peu
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13 mars
rien ne sauvera de la mort
car rien ne garde de ce qui précédait le commencement |
une autre force que celle qui serrait chacun comme le cordon d’une bourse sur l’inestimable trésor de sa vie dont elle organisait avec précision l’économie, une autre force opérait contrairement qui poussait à la dépense, au gaspillage, à l’épuisement, et semblait vouloir faire advenir vite et comme une joie ce que la première repoussait et regardait comme une catastrophe
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à la mouche lorsque sur elle il lève son journal il dit qu’il est désolé désolé ma vieille mais j’ai assez d’emmerdements comme ça tu comprends ça me rend irascible et là-dessus ton bourdonnement ton insupportable légèreté et puis je ne crois pas que ton espèce soit menacée par le changement climatique en d’autre temps j’aurais ouvert les fenêtres et attendu patiemment que tu sortes mais là les circonstances et la manière dont elles m’affectent et ma propre précarité ma gravité tout ça joue contre toi adieu désolé adieu et il abat Le Monde sur la fenêtre et clac il sait qu’il l’a eue c’est comme si en lui avait résonné le craquement minuscule de l’exosquelette il la cherche sur la vitre puis par terre mais elle est là sur le papier comme un gros mot d’une langue étrangère un mot proéminent silencieux et absurde comme la mort |
5 mars
il pleut
depuis hier deux gros fauteuils et un divan tachent la cour luisante de leur skaï noir crevé jaune de ci de là bonjour Monsieur c’est un cycliste pour les temps bien courageux je suis Poisson mademoiselle A bâtiment troisième étage nous ne jamais nous sommes rencontrés savez-vous viennent d’où ces meubles abandonnés depuis hier non avant-hier je crois moi je suis au premier bâtiment B non je ne sais pas n’importe nous allons cour la débarrasser nous trouverons comme toujours bonne une solution journée |
nous n’aurions bientôt plus pour solque le ventle soleil et la pluiede nos espoirs et de nos peurs nousserions seulscouronnés rois sans sujetsque nous-mêmesà réformer
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28 février
le petit désordre de mon bureau ne m’appartenait pas tout à fait
celui de ma vie non plus
d’autres mains que les miennes y désœuvraient
vives et imprécises comme d’enfants
mon regard s’y posait d’abord
à la manière des oiseaux
puis perdait de son acuité et la certitude que la vérité
quelque chose qu’à défaut je nomme vérité
lui était accessible
j’avais alors les yeux de ceux
qui devant une tombe savent que c’est au-delà
des fleurs et de la pierre
que cela se tient
qui se défait
23 février
les sardines les tulipes prises
au grand marché de la mer vide et
de la terre épuisée donnent
au regard des restes de joie des
tourments à l’esprit l’enfant
qui danse qu’il demeure
vif en l’alarmé
qu’à la lueur de la lame du couteau
plongée dans la chair claire des fenouils des
carottes des aulx recule la nuit
la mélancolie la chair exulte aussi
sur la voie de sa poussière
16 février
on n’aurait plus de sol où
boutonner les arbres où
habiter les plis de la terre où
paver les espérances où
adresser la prière incertaine des cabanes où
tomber où
border le lit des morts où
tracer les visages des paysages où
atterrir on n’aurait plus d’où
que l’air
de vivre
3 février
les averses de la nuit ont laissé comme des traces d’un long baiser des flaques dans les allées du Luxembourg où courent
sous le ciel gris de ce lundi de février rayé de branches effeuillées
ou plutôt se secouent
le visage rougi les
oreilles au bout des fils d’un téléphone les temps
qui courent
et
par-delà les grilles sur les
trottoirs
les poubelles débordées d’ordures font la queue
et crient
quelque chose comme
manger rien
tout vomir
on n’entend pas très bien l’époque on sait
qu’elle crie
on devine une gésine mais
comme on est dans le ventre aussi
ohé on ne voit pas les extrémités
1er février
ce jour-là février débuta de très bonne heure et sous la pluie
c’était des douze apôtres de l’année celui
dont je préférais le nom j’aimais
l’élan fiévreux qu’il imprimait
au rallongement du jour
et que par des presciences de printemps il bousculât parfois le cours
de l’hiver
aussi dès son commencement me porta-t-il aux vers
que voilà
là
31 janvier
j’étais assis au pied de l’immeuble sur le banc, j’avais perdu mes clés, j’attendais, elle s’arrêta devant les poubelles qui débordaient sur le trottoir et cria ah ! ils sont pas passés ! mais les vraies ordures sont pas là-dedans, c’est les saloperies de ce quartier qui prostituent les gosses ! les passants s’écartaient, elle demeurait là, un cabas pendu au bras gauche, lançant le droit en avant, en l’air, envoyant promener je ne sais quoi, tout, criant les salauds, les dégueulasses, vous vous rendez compte, des gosses, ils ont plus qu’à crever après ça, c’est peut-être crever qui m’a fait revenir que le soir, la veille, j’avais désiré un tombeau, pas un lieu où je fusse mort, je n’étais pas plus pressé que ça de mourir, mais c’était tout de même tombeau le mot qui m’était venu pour un lieu où plus personne ne viendrait me proposer quelque commerce que ce soit, m’interpeller, m’inviter, me séduire, m’insulter, me questionner, me toucher, me regarder même, pas plus qu’on n’interpelle, n’invite, ne séduit, n’insulte ne questionne ne touche ou ne regarde les morts qu’une épaisse couche de terre, ou de pierre ou de ce qu’on voudra protège de toute façon des velléités que pourraient avoir les vivants de les interpeller, inviter, séduire, insulter, questionner, toucher, regarder, pas un tombeau véritable mais un lieu où, loin de mes pareils que par une concession lâche à leur susceptibilité j’appelle ainsi alors qu’ils sont plutôt, je le sais, mes dissemblables, et elle, peut-être, la folle qui parlait tout haut de son enfance, ma sœur, un lieu où je pourrais vivre du peu qui m’est essentiel, dans un corps à corps avec la phrase, la phrase que je cherche obstinément depuis si longtemps que s’y égarent mes efforts de datation, la phrase dont l’origine, l’ombilic n’a pas de majuscule et qui, à elle, l’imprécatrice, ne semblait pas si difficile, elle qui a poursuivi son chemin, ou fait demi-tour, je ne sais pas, je ne l’avais pas vue arriver