Mois : février 2020
28 février
le petit désordre de mon bureau ne m’appartenait pas tout à fait
celui de ma vie non plus
d’autres mains que les miennes y désœuvraient
vives et imprécises comme d’enfants
mon regard s’y posait d’abord
à la manière des oiseaux
puis perdait de son acuité et la certitude que la vérité
quelque chose qu’à défaut je nomme vérité
lui était accessible
j’avais alors les yeux de ceux
qui devant une tombe savent que c’est au-delà
des fleurs et de la pierre
que cela se tient
qui se défait
Ceci, disait-il, est mon corps
23 février
les sardines les tulipes prises
au grand marché de la mer vide et
de la terre épuisée donnent
au regard des restes de joie des
tourments à l’esprit l’enfant
qui danse qu’il demeure
vif en l’alarmé
qu’à la lueur de la lame du couteau
plongée dans la chair claire des fenouils des
carottes des aulx recule la nuit
la mélancolie la chair exulte aussi
sur la voie de sa poussière
Dans l’embarras
16 février
on n’aurait plus de sol où
boutonner les arbres où
habiter les plis de la terre où
paver les espérances où
adresser la prière incertaine des cabanes où
tomber où
border le lit des morts où
tracer les visages des paysages où
atterrir on n’aurait plus d’où
que l’air
de vivre
Mais si mon coeur
3 février
les averses de la nuit ont laissé comme des traces d’un long baiser des flaques dans les allées du Luxembourg où courent
sous le ciel gris de ce lundi de février rayé de branches effeuillées
ou plutôt se secouent
le visage rougi les
oreilles au bout des fils d’un téléphone les temps
qui courent
et
par-delà les grilles sur les
trottoirs
les poubelles débordées d’ordures font la queue
et crient
quelque chose comme
manger rien
tout vomir
on n’entend pas très bien l’époque on sait
qu’elle crie
on devine une gésine mais
comme on est dans le ventre aussi
ohé on ne voit pas les extrémités
Par l’étroiture
1er février
ce jour-là février débuta de très bonne heure et sous la pluie
c’était des douze apôtres de l’année celui
dont je préférais le nom j’aimais
l’élan fiévreux qu’il imprimait
au rallongement du jour
et que par des presciences de printemps il bousculât parfois le cours
de l’hiver
aussi dès son commencement me porta-t-il aux vers
que voilà
là